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LA PRATIQUE DU VELO EST UN ENJEU SERIEUX DE MOBILITE
La liste des avantages économiques, écologiques et sociaux liés à la pratique du vélo urbain sont très nombreux, or si cet usage est très répandu chez nos voisins européens, le cycliste français est d’abord considéré comme un original, un marginal. Pourtant depuis vingt ans l’image du vélo est bonne et les urbains réclament des aménagements. Cependant au pays du Tour de France, la petite reine c’est d’abord la voiture en ville, fruit de la politique des années 70 ou la ville devait s’adapter à la voiture. Le vélo en France décolle lentement alors que de nombreuses villes européennes qui ne bénéficient pas de conditions climatique ou géographique meilleurs, ont su se donner les moyens de changer la donne.
UNE CROISSANCE TROMPEUSE DE LA PRATIQUE DU VELO
Méfions nous des effets de mode, s’il existe une sorte de consensus sur le vélo et les circulations douces en général et une apparente embellie de la pratique vélo en ville, il apparaît à y regarder plus finement que si le vélo progresse dans les centres villes des grandes métropoles, +de 50 % ces dernières années, en même temps, il régresse en périphérie dans les mêmes proportion sur ces mêmes agglomérations.
Ainsi on constate une pratique du vélo à deux vitesse, un vélo urbain, pratique, connoté moderne avec des aménagements de type zone 30, contre sens cyclable, bande cyclable et une pratique beaucoup plus difficile en périphérie où les aménagements, rocade, voie expresse et étalement urbain agissent comme des frontières.
Ce clivage n’est pas étranger à Bordeaux et sa périphérie, si la pratique du vélo a fortement progressée sur le centre ville de Bordeaux elle n’a pas franchement explosée en périphérie.
Ainsi la croissance de la pratique en centre ville de Bordeaux s’explique aisément par plusieurs phénomènes, travaux du tram, circulation voiture difficile, des aménagements et une bonne communication de la ville de Bordeaux alliée au prêt de vélos, la maison du vélo et au lobbying efficace et intelligente de Vélocité. En revanche en périphérie les contraintes sont diverses et multiples, distances, cout des aménagements, voie rapide absence de réseau associatif structuré dans le domaine en périphérie et éparpillement de la volonté politique mélangée à la confusion faite entre le vélo loisir près des cours d’eau par exemple et la pratique du vélo rarement vécu comme un moyen de déplacement à part entière. Il faut ajouter à cela un sentiment de plus en plus généralisé d’insécurité, les parents de jeunes cyclistes ont le sentiment que le vélo est dangereux. Le premier prétexte est utilisé pour se dédouaner du simple effort, soit il pleut, soit il n’ y a pas de pistes cyclables, soit s’est trop loin, soit le vélo a été volé, soit le vélo n’est pas pratique en costume ou tailleur, soit il n’ y a pas de douche ou de vestiaire sur le lieu de travail etc.
Pour autant à chacun de ses prétextes il existe des arguments, le taux d’accidents est très faible et le risque comparé à la voiture est deux fois moins important, un ou deux morts par an sur la CUB. La pluie représente 5 % du temps en moyenne. Les pistes cyclables ne garantissent pas toujours la sécurité et ne sont pas possible partout, il faut donc que le vélo prenne sa place partout et ne soit pas mis à l’écart.
Le constat fait actuellement au sein de la CUB, c’est qu’il n’ y a pas une réelle politique dans le domaine des circulations douces. Le vélo est vécu comme un supplément d’âme pour respecter les règles mais il est rare que les projets incorporent dès leur conception la pratique du vélo.
Si dans chaque aménagement nouveau la prise en compte des deux roues est réelle, comme la loi l’oblige, notamment par les Grands Travaux, on ne constate pas une volonté politique qui se traduirait par une lisibilité sur des aménagements urbains plus difficiles et par l’existence d’une ligne budgétaire propre.
S’il y a des aménagements qui se font, on constate beaucoup de timidité par un manque de culture des circonscriptions de voiries notamment. Noyé dans la masse du budget des itinéraires ou des enveloppes secondaires, les circulations douces sont le parent pauvre.
Pour preuve il n’existe pas de fonctionnaire à temps plein formé et spécialisé dans ce domaine, ni d’élu d’ailleurs. L’axe 5 du PDU consacré aux circulations piétonnes et cyclables est évalué à moins de 3 millions d’euros par an. Il n’existe pas de stratégie affirmée autre que celle d’achever les liaisons cyclables entre elles, ce qui est la moindre des choses, ou de partager la rue sans autre forme de perspective avec des objectifs précis.
Il n’existe pas de réel chef de file en la matière, car le PDU ne joue pas son rôle d’orientation de la politique générale des déplacements faute de portage politique. Le PDU n’a pas ré orienté les politiques toujours restées sectorielles et par conséquent il n’ y a eu aucune inflexion significative de certaines lignes budgétaires au profit d’autres. Le PDU est cantonné dans un rôle descriptif alors qu’il devrait jouer un rôle prescriptif.
La principale conséquence c’est un morcellement de la politique en matière de déplacement combiné au desiderata des Maires. Entre les déplacements, les transports hors tramway, le tramway, la voirie, les grands travaux, la signalisation, la circulation qui recouvre on ne sait quoi, il existe une atomisation générale des compétences qui se fait au détriment des plus faibles, les piétons et les cyclistes.
Si les Maires sont maîtres chez eux, la CUB en concertation avec les maires, doit organiser sa programmation en s’appuyant sur le PDU.
UNE POLITIQUE RESOLUMENT ORIENTEE VERS LA COMPLEMENTARITE CIRCULATIONS DOUCES TRANSPORT EN COMMUN.
Une cellule de coordination au sein des services de la CUB qui associerait également des partenaires externes, CG33,service de l’ Etat, SNCF, CONNEXE, GERTRUDE, doit piloter le dossier circulations douces et infléchir la politique publique en la matière.
L’enjeu du dossier consiste à fixer des priorités et une hiérarchie. En l’occurrence il apparaît, compte tenu du profil de l’agglomération, étalement urbain notamment et réseau de bus important qu’il faille privilégier la complémentarité piéton, vélo, bus, Tram, Train et non la concurrence entre les modes. Le vélo en ville à un rôle à jouer, son rayon d’attraction d’une gare ferroviaire est de 2km 4 et de 800 m pour un piéton. Cette intermodalité doit constituer une véritable alternative à la voiture sur l’agglomération. Ainsi une réflexion doit être engagée afin que les aménagements nécessaires puissent être entrepris afin de lever les freins à l’utilisation du vélo. Il existe des outils, notamment les PDE, les plans de mobilités, les CHSCT sont également des interlocuteurs. Si la CUB a décidé comme le PDU lui demande de soutenir les plans de déplacement des entreprises, la loi SRU demande aux collectivités autorité organisatrice de transport de mettre en place un conseil en mobilité auprès des entreprises notamment. Cette politique pour l’heure est avant tout assez timide, la CUB joue un rôle d’accompagnement mais pas un rôle moteur.
La diminution de la présence de la voiture en ville priorité du PDU passe principalement par un lien très fort entre les deux roues et le transport en commun. C’est entre ces deux modes que l’on trouvera le véritable pilier intermodal.
Il est nécessaire qu’une véritable prise de conscience politique naisse sur le sujet.
Les arguments sont multiples et d’abord financier.
En effet une politique vélo n’est pas budgétivore, les cyclistes ne demandent pas de grands travaux d’ailleurs et le rapport coût efficacité des aménagements cyclables est nettement à l’avantage de ces derniers au détriment des aménagements routiers.
D’après la Direction Générale des Transports de la Commission Européenne, en une heure, sur une largeur de 3m 50 on peut faire passer 22 000 personnes en tramway, 19 000 à pied, 14 000 à vélo, 9 000 en bus et seulement 2 000 en voiture.
Les aménagements cyclables sont simples, réversibles, visibles et opérationnels rapidement. Pour exemple l’arceau pour accrocher le vélo est un équipement indispensable au développement du vélo, car il apporte la sécurité pour poser le vélo, sa multiplication sur les lieux publics mais également auprès des arrêts de bus est facile à mettre en œuvre et opérationnel immédiatement. Ainsi l’aménagement cyclable ne se réduit pas seulement aux bandes ou pistes cyclables, mais d’abord il doit être conçu pour faciliter la vie des deux roues, zone 30, coussin berlinois, contre sens, maillage entre deux bandes ou pistes, communication etc.
IL est donc absolument nécessaire de faire naître une ligne budgétaire circulation douce de plusieurs millions d’euros par an en redéployant notamment les crédits voiries qui fonctionnent actuellement avec 6 mois et un an de report.
Cette politique doit s’accompagner de l’accélération de la réalisation du schéma directeur cyclable.
Il est également primordial que les moyens et la formation en personnel pour les études d’aménagement soit renforcé afin qu’une culture vélo se développe et que certains principes soient institués principalement :
Faire ralentir les automobiliste et pas les cyclistes par une politique volontariste de zone 30 qui sécurise piétons et cyclistes en privilégiant une circulation apaisée.
Bannir les rues en sens unique qui provoquent une augmentation de la vitesse et des distances parcourues avec des nuisances multiples, bruit, pollution, insécurité et un effet dissuasif sur les vélos.
Développer le contre sens cyclables dans les petites rues, le code des collectivités territoriales par l’article L 2213-2 autorise le maire à prendre des arrêtés
Favoriser en même temps les piétons et les cyclistes, pas l’un ou l’autre
Pour lever les freins il faut également accompagner la politique vélo par une politique de services de proximité, station vélo, gardiennage surveiller dans les parcs relais notamment mais également dans les parkings publics. Cette politique doit être suivie également par une campagne de communication permanente à l’échelle de la CUB pour informer, inciter, éduquer ceci auprès de tous les types de publics et pas seulement les enfants, mais les adultes et les entreprises. A l’heure où l’obésité est en passe de devenir une épidémie notamment chez les jeunes d’ici quelques années, la pratique du vélo, accessible physiquement à 80 % de la population est aussi un enjeu de santé publique.
Alors que la moitié des déplacements en voiture concernent des distances inférieurs à 3 km il est temps de prendre au sérieux le vélo et d’en faire une réelle alternative. Le vélo est pratique, peu encombrant, non polluant, pas cher, c’est une médecine douce face à la congestion des villes. Les cyclistes ne sont pas demandeurs de grands aménagements, ils demandent une réelle volonté, une prise en compte du problème, une considération générale.
Gérard CHAUSSET
Décembre 2004