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Politique | #4 Bordeaux : Comment s’y déplace-t-on ?

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Politique | #4 Bordeaux : Comment s’y déplace-t-on ?

Sur aqui.fr par Pierre SAUVEY

20/03/2014 | Comment se déplacer dans un Bordeaux « métropole millionnaire », alors que les embouteillages font perdre 41 heures par an aux automobilistes bordelais ?

Les déplacements sont au cœur des enjeux de Bordeaux et de la Communauté Urbaine. Comment s’y déplacer avec un million d’habitants alors que les automobilistes bordelais perdent déjà 41 h par an dans les embouteillages ? Arrivée de la LGV en 2017, 3ème phase du tramway, TER, gares multimodales, rocade, grand contournement, liaison gare-aéroport, BlueCub, BatCub, VCub, tram-train du médoc, nouveaux ponts, boulevards, stationnement, liaisons vers Saint-Médard, Caudéran, Talence ou Gradignan… Que proposent les deux principaux candidats Alain Juppé et Vincent Feltesse ?

Comment gagner 250.000 habitants d’ici 2030, soit un tiers de population en plus, tout en améliorant les déplacements des habitants du « Grand Bordeaux », trop souvent englués dans les embouteillages de la rocade ou des boulevards ? Sans oublier, l’actualité récente le rappelle, que la lutte contre la pollution atmosphérique et les particules fines devrait s’imposer comme une priorité aux politiques. Le tout dans un contexte de contraintes budgétaires de plus en plus fortes. Nous sommes donc bien là au cœur d’un très gros enjeu pour les exécutifs qui sortiront des urnes les 23 et 30 mars prochain. 

Selon le classement du fabricant de GPS Tom Tom, Bordeaux se trouvait en 2012 à la 3ème place des villes les plus embouteillées de France derrière Marseille et Paris. La situation paraît s’être un peu améliorée en 2013 avec la mise en service du Pont Chaban-Delmas.  Selon l’étude INRIX (1), Bordeaux demeure à la 4ème place derrière Paris, Lyon et Grenoble avec 41 heures perdues dans les bouchons en 2013, mais c’était 46 heures de perdues en 2012 (Marseille n’est pas prise en compte dans cette étude).

 

Pour tenter d’apporter une réponse globale au problème, le président de la Communauté Urbaine Vincent Feltesse avait lancé en 2011 le « Grenelle des Mobilités », avec la participation de l’Etat et des autres collectivités locales (Conseil régional, Consei général, ville de Bordeaux). Le rapport a été rédigé en avril 2013 par l’agence d’urbanisme A’Urba, dirigée par Jean-Marc Offner. Il en est ressorti une synthèse de 20 principes et 18 mesures d’actions « qui donnent chair aux principes (et) doivent donc être comprises comme un tout ». Ces conclusions « coproduites » avec les collectivités locales, les employeurs, les syndicats, les associations d’usagers et des experts, paraissent avoir été un peu oubliées par les uns et les autres pendant cette campagne électorale, mais pourraient ressurgir après les élections. En attendant, faisons un tour des projets !

La rocade C’est la principale bête noire des automobilistes aux heures de pointe. Selon le rapport d’A’Urba, son trafic se situe entre 109.000 et 131.000 véhicules rive droite (9 à 15% de PL) et entre 84.000 et 89.000 entre le pont d’Aquitaine et l’A63 (dont 6 à 7% de PL). « La vie quotidienne des girondins se dégrade alors que l’efficacité des entreprises est mise à mal » relèvent les rédacteurs.

Face à ce constat, la mise à deux fois trois voies sur la totalité de la rocade est une première réponse. Après les travaux autour de Pessac, le préfet Michel Delpuech pour l’Etat et Vincent Feltesse pour la CUB ont signé en juillet dernier une convention de financement concernant des études pour le bouclage de l’ensemble de la rocade d’ici 2020, avec le principe  d’un partage du financement entre l’Etat et la CUB à hauteur d’environ 100 millions chacun. Début des travaux prévus en 2016. Symboliquement, Vincent Feltesse avait d’ailleurs organisé sa conférence de presse de rentrée en septembre au cœur d’un chantier de travaux en cours de la rocade.

 

« Il faut accélérer la mise à 2x3 voies de la rocade » tranche Alain Juppé. Il propose pour cela de faire réaliser les travaux sans bourse déliée et en cinq ans (soit l’horizon 2019 au lieu de 2020) par des sociétés autoroutières en échange de l’allongement de leur durée de concession sur certaines autoroutes.  Cette idée avait été présentée au départ par Vincent Feltesse, mais n’avait pas paru avancer suffisamment avant la signature de la convention de financement avec l’Etat.

Une autre idée avancée par EELV/ Les Verts et reprise par Vincent Feltesse est de réserver une voie au covoiturage et aux transports en commun pour limiter la circulation. « Il faudrait aussi interdire la circulation des PL en transit aux heures de pointe » affirme Gérard Chausset, vice-président EELV de la CUB en charge des transports de demain. Etaler  les horaires d’embauche est aussi une piste évoquée lors du Grenelle des mobilités, qui permettrait de limiter fortement  les pics de circulation.

Les boulevardsAutre gros point noir de la circulation bordelaise, les boulevards, avec 30.000 véhicules par jour. La construction du futur Pont Jean-Jacques Bosc, entre Bègles et Floirac à l’horizon fin 2018, après l’inauguration du pont Chaban-Delmas en 2013, doit permettre leur bouclage à cet horizon. Le projet retenu par Vincent Feltesse (comme président de la CUB) prévoit la présence d’une voie par sens de transport en commun en site propre et d’une dans chaque sens pour les VL et les PL, plus un espace dévolu aux « modes de déplacements collectifs ou alternatifs », ainsi qu’un espace affecté aux vélos et aux deux roues.

Mais cela implique qu’il faudra aussi une « requalification » des boulevards. Vincent Feltesse propose dans son programme  « 5 propositions pour une boucle bordelaise apaisée », avec la volonté de « faire des boulevards, sans en chasser la voiture, un axe structurant pour les transports collectifs ». Il est question de « repenser le stationnement avec des parkings en silos avec des tarifs préférentiels pour les habitants ».

Dans son « projet écrit pour Bordeaux », Alain Juppé n’évoque pas les boulevards, mais il a présenté le 11 mars un plan pour leur réaménagement, avec l’idée de les faire passer à 2x1 voie de circulation (contre 2x2 actuellement), avec des voies de transports en commun en site propre et des voies sécurisées pour les vélos. Afin de limiter la circulation intraboulevards, il évoque aussi la création de parkings relais, dont un parking silo à la Cité administrative.

Le grand contournementLe dossier du « grand contournement » s’avère particulièrement clivant. Il n’en est pas question pour Vincent Feltesse, sous quelque forme que ce soit. Il l’avait dit dès l’enterrement du projet en 2008, et répété lors du Grenelle des mobilités : « Le grand contournement ne dévierait que 16% du trafic de la rocade et ne résoudrait pas le problème des heures de pointe. Il faut sortir de la fascination des grandes infrastructures ».

Alain Juppé défend depuis début 2013 l’idée de « barreaux de raccordement entre les autoroutes » (A10, A89, A62, A63), ce qui permettrait d’interdire aux poids lourds en transit d’utiliser la rocade. Le maire de Bordeaux et ancien ministre de l’Ecologie et du développement durable a plusieurs fois changé de positions sur ce dossier.  « Faire un grand contournement, cela veut dire qu’on se résigne à avoir sur l’A10 et la future A63 non pas un mur de camion, mais deux, avec deux files pour les camions et une pour les voitures. Et cela c’est impossible à accepter(…) Je crois qu’on n’a pas le droit de s’engager dans cette voie-là » déclarait-il ainsi en 2009, dans le Moniteur, en précisant d’ailleurs : « là-dessus, ce n’est pas la seule fois que ca m’est arrivé et j’espère que ce ne sera pas la dernière, j’ai évolué ».

Le stationnementA 2,4€ de l’heure dans les parkings souterrains du centre ville, avec des places raréfiées en surface, se garer dans Bordeaux n’est pas vraiment simple ni bon marché. Mais cela fait partie de la volonté de limiter la place de la voiture dans la ville. Il est question d’extension du stationnement payant à l’intérieur des boulevards, avec tarif préférentiel pour les résidents. A quelques jours de l’élection, Alain Juppé a annoncé que le tarif mensuel pour les professionnels de santé, les commerçants et les artisans allait être divisé par 2 en passant de 60 à 30 euros. Par ailleurs, la création de nouveaux parkings relais (ceux déjà existants étant le plus souvent saturés)  est prévue par la Communauté Urbaine

 

La LGV, les TER, la gare et la liaison gare-aéroport Le grand changement des prochaines années sur le plan des transports à Bordeaux pourrait bien être ferroviaire avec l’arrivée de la LGV en 2017.  « Demain, ce sont 20 millions de passagers qui transiteront chaque année par la Gare de Bordeaux. On ne pourra pas se contenter d’une ligne de tram. D’où l’idée (inspirée par Gérard Chausset, NDLR) d’une voie de tram de 1,4 kms entre Saint-Jean et la Victoire qui permettrait de relier rapidement la gare au centre ville et le campus pour les étudiants » analyse Vincent Feltesse, qui évoque aussi la nécessité d’améliorer la liaison gare-aéroport. Une liaison Aéroport Pessac-Alouette pourrait aussi faciliter celle-ci. Il avance aussi « l’hypothèse du Bluetram, nouveau tramway 100% électrique  pour se substituer à la navette Jetbus pour la liaison aéroport-centre ville ».  Alain Juppé fait de celle-ci une priorité : « Il faut préparer l’aéroport au choc de l’arrivée de la LGV en 2017, avec une solution simple : prolonger la ligne A de 3 à 4 kms » annonce-t-il.

Au chapitre ferroviaire, il faut aussi évoquer le développement de gares multimodales existantes ou à venir, (Pessac, Arlac, Bègles, Cenon…) facilitant l’usage des TER, notamment pour les trajets domicile-travail. Il faut noter de ce point de vue le système de titres de transports unifiés Modalis mis en place par la région pour les TER, le département avec ses bus, et les transports en commun de la CUB. Les communistes apprécient particulièrement l’idée de bouclage de la voie de chemin de fer de ceinture qu’ils défendent avec persévérance depuis près de 30 ans.

 

Le tramwayC’est la grande fierté des bordelais et d’Alain Juppé : le tramway qui vient de fêter ses dix ans a révolutionné la ville, mais aussi la mobilité dans l’agglomération. Depuis 2004, c’est Alain Rousset puis Vincent Feltesse qui ont pris, comme présidents de la CUB, le relai du dossier tramway. Au terme da la troisième phase, il devrait atteindre 77 kms. Mais il fait aussi des jaloux. Ainsi Alain Juppé et le groupe Communauté d’Avenir promettent le tramway pour relier Saint-Médard par la ligne D, ou encore la réalisation entre Pellegrin et Gradignan via le Campus. Alain Juppé parle aussi d’un Bus à Haut Niveau de Service pour Caudéran. « Il faudra phaser tout ça dans le temps et réaliser des économies par ailleurs »  modère-t-il cependant. Il souhaite aussi augmenter les tarifs de transports publics pour financer les nouveaux équipements.

« Communauté d’Avenir promet le tram partout. Ce qu’ils promettent va coûter 700 à 800 millions d’euros et ne sera pas possible avant au moins 2025 » critique Vincent Feltesse. Lui propose notamment un tramway sur pneu (d’une technologie déjà adoptée par la RATP) pour relier  Saint-Médard plus rapidement et moins cher. Il veut aussi relier Ravezies à Cenon Pont-Rouge via le pont Chaban, quand Alain Juppé veut mettre à l’étude la liaison de pont à pont Chaban-Jean-Jacques Bosc.

Le projet déjà en travaux de tram-train du Médoc lancé par la CUB et Vincent Feltesse au nom de l’égalité des territoires de la Communauté Urbaine est fustigé par Communauté d’Avenir, qui le  juge trop cher pour trop peu d’usagers potentiels. Critiques reprises par l’association TransCub qui avait eu en son temps raison du projet de métro de Jacques Chaban-Delmas.

« En six ans, nous avons fait 3x30 pour les transports en commun : 30 millions de voyageurs en plus, 30 kms de couloirs de bus et 30 kms de tram » rappelle Gérard Chausset.

 

VCub, Batcub, BlueCub Côté déplacements alternatifs, la CUB affiche sa suprématie avec la trilogie VCub, BatCub, BlueCub. Mais là encore les deux camps se chamaillent. La ville de Bordeaux a pris un temps d’avance avec un service de prêt gratuit de vélos dès 2001. La Cub a de son côté lancé les VCub, en libre service payant, en 2010. La ville a repris l’avantage en communication avec le vélo Pibal dessiné par Philippe Starck et confié en essai à des personnes actives sur les réseaux sociaux.

Pour l’auto-partage, la CUB avait dégainé la première en appuyant depuis plusieurs années le développement d’Autocool (devenu CityZen). Mais Alain Juppé a joué un joli coup avec Vincent Bolloré venu annoncer qu’il allait lancer sa BlueCar à Bordeaux… Vite rattrapé par Vincent Feltesse qui n’a pas eu de mal à convaincre l’industriel que la Communauté Urbaine était plus indiquée que la seule ville centre pour lancer son service. Et depuis, c’est avec Feltesse que Bolloré discute pour expérimenter son BlueTram.

Quant aux BatCub qui ont permis à Bordeaux de retrouver des navettes fluviales, elles ont encore du mal à s’imposer, avec les malheureux problèmes techniques qu’elles ont connu, elles qui viennent tout juste de reprendre leur service en ce mois de mars.

Développement des déplacements doux, extension des zones 30 en ville, développement des pistes cyclables, mise en service de davantage de rames pour augmenter la fréquence des trams en ville figurent aussi dans les programmes.

Passées les joutes électorales, les exécutifs élus devront en tout cas reprendre rapidement le complexe dossier des déplacements, en s’inspirant pourquoi pas du très sérieux travail du Grenelle des Mobilités, et en ne pensant, on l’espère, qu’à l’intérêt commun.

 

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