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Un expert mandaté par l’association Trans'CUB et le comité de quartier de Caudéran considère que la future ligne D est vouée à l’échec en raison de son coût élevé et de sa fréquentation surestimée
La future ligne D du tram reste dans le brouillard. Elle n'en finit pas de faire débat. © Photo
Le dossier de la ligne D du tramway, et par voie de conséquence celui de la desserte de Caudéran par les transports en commun, n'est pas encore clos. C'est en tout cas la conviction de l'association Trans'Cub, qui a trouvé là un nouveau cheval de bataille après son échec à faire capoter le tram- train du Médoc mais aussi (et peut-être même surtout) celle du comité de quartier de Caudéran, une association de défense en place depuis 1988.
Denis Teisseire pour Trans'Cub et Marc Guion de Méritens pour l'association ont réussi un joli coup en obtenant un audit d'un expert en économie des transports, Pierre Vince, ingénieur civil des ponts et chaussées : « Nous voulions un regard extérieur » explique Denis Teisseire.
Denis Teisseire, Pierre Vince et Marc Guion de Méritens.© Photo Philippe Taris
Le diagnostic de Pierre Vince est sans appel. Son « expertise du dossier d'évaluation socio-économique de la ligne de tram D » laisse en effet apparaître, entre autres, « des performances surestimées sur la vitesse commerciale, la régularité et donc l'attractivité de cette ligne et la fréquentation qui en résultera ». L'expert remarque en effet que sur les 10 kilomètres de la ligne, 6,5 km ne seront pas en site propre, soit en voie unique, soit dans le flot de la circulation. Par ailleurs, il considère que l'investissement a été sous-évalué : « Il faudra au moins dix rames supplémentaires », note-t-il.
D'autre part, il juge « irréaliste » les prévisions du trafic et problématique la rentabilité : « Pour que l'investissement soit rentable, il faut que le taux de rentabilité interne soit au minimum de 4. La CUB prévoit 4,6 alors qu'il sera au maximum de 2. »
Enfin, l'expert se dit « choqué » que le commissaire enquêteur qui a supervisé l'enquête d'utilité publique n'ait pas relevé l'absence d'informations intermédiaires « comme si la décision d'implanter cette ligne allait de soi ». Il estime en effet qu'une étude d'impact n'a rien à voir avec celle de rentabilité. Venant d'un spécialiste qui a évalué des études de transports urbains à Mexico, Hanoï Lima, Paris, Le Mans, Nancy et Lyon (entre autres), la remarque pèse un certain poids…
Forts de ces enseignements, Denis Teisseire et Marc Guion de Méritens vont mettre le paquet pour tenter de transformer la ligne D du tram, qu'ils jugent trop coûteuse, en une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) couplée avec la même ligne irriguant Caudéran : « Puisque MM. Juppé et Feltesse parlent d'un BHNS ou d'un tramway à pneus passant par Caudéran, nous leur disons chiche. Mais attention : ils n'en auront pas les moyens si la ligne D du tram est maintenue en l'état. Par conséquent, consacrons les 250 millions réservés à la ligne D pour des transports en sites propres dans les deux corridors du Nord Ouest qui ont effectivement besoin d'être améliorés, l'expertise l'a montré. Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse. »
Les deux hommes ont demandé un rendez-vous à Vincent Feltesse et Alain Juppé. Ils préparent également une pétition qui risque fort d'animer la fin de campagne quand on sait la réceptivité des Caudéranais sur le sujet : « C'est quand même incroyable qu'un quartier aussi peuplé que Bayonne n'ait pas un transport public digne de ce nom ».
Gérard Chausset : "Le bus est vite saturé"
Gérard Chausset, le vice président de la CUB, estime qu'un bus à haut niveau de service n'est pas la solution sur le tracé de la ligne D
Vice-président aux transports à la Communauté urbaine, Gérard Chausset a accueilli avec un certain détachement l’intervention de l’expert Pierre Vince : « Des études et des expertises, il y en a eu déjà des quantités et il n’y a rien de bien nouveau. L’étude de Systra a exploré quatre corridors dont celui de la future ligne D par Fondaudège et celui de Caudéran. Or, le premier est celui qui offre le plus gros potentiel en matière de fréquentation dans les trente prochaines années. »
Concernant la proposition d’un bus à haut niveau de service à la fois par Fondaudège et Caudéran, Gérard Chausset apporte quelques précisions : « Il faut savoir qu’un BHNS réclame une emprise de 7 m de large, soit plus qu’un tram à pneus ou rails; en outre, comme il est limité à 25 m, il est destiné à être plus vite saturé (on le voit actuellement à Nantes) et donc à réclamer davantage de fréquences, ce qui représente un coût énorme. On dégraderait donc d’emblée le service. Néanmoins, c’est un dossier que nous avons remis à l’État dans le cadre du Grenelle 3 pour Caudéran afin d’obtenir des subventions. Mais il est possible que le tram à pneus, moins large et à peine plus cher, soit finalement choisi. »
Quoi qu’il en soit, l’offensive de Trans’Cub arrive un peu tard. Les travaux vont commencer en avril et l’itinéraire de substitution des bus est en train de se mettre en place. La question du corridor Nord-Ouest de Bordeaux, qui dure depuis les années 70, et le feuilleton de la ligne D n’en ont peut-être plus pour très longtemps.
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