Ainsi, à droite, Alain Juppé, premier vice-président de la Communauté urbaine, et Christophe Duprat, vice-président aux transports, jugent que cette hausse est nécessaire pour que les frais liés au réseau soient mieux répartis entre la collectivité (autrement dit tous les contribuables) et les usagers.
"Les recettes générées par les titres de transports couvrent à peine le tiers des dépenses liées aux transports. 70% de ces dépenses sont financées par le contribuable, et non par les rentrées du réseau" avait indiqué Alain Juppé la semaine dernière.
Christophe Duprat note pour sa part : "Dans un monde idéal, on aurait des dépenses qui restent stables et des recettes qui augmentent grâce au succès du tram, mais la préparation des extensions de la troisième phase, jusqu'à Villenave d'Ornon et jusqu'au Lac par exemple, nécessite de nouvelles dépenses".
Gérard Chausset, élu écologiste et vice président de la CUB, en charge des transports de demain, considère lui aussi qu'il faut penser à une hausse des tarifs à partir de juillet 2014. "Je préfère le dire honnêtement : cette hausse paraît inévitable, ne serait-ce parce que la TVA sur les transports publics va passer de 7 à 10% en 2014. Il faudra donc répercuter cette hausse. Et il s'agit aussi de préserver la capacité de la CUB à investir."
Le président de la CUB, Vincent Feltesse, par ailleurs challenger socialiste d'Alain Juppé à la mairie de Bordeaux, se démarque pour sa part de ce consensus. Dans une interview parue la semaine dernière sur 20minutes.fr, il considère que cette hausse n'est "pas inéluctable." "Nous prendrons cette décision après avoir reçu, en février, les offres des deux compétiteurs à la délégation de service public, Veolia-Transdev et Keolis. Je ne dis pas que c’est faisable, mais je ne pars pas perdu d’avance, surtout à un moment où le pouvoir d’achat est dégradé. Je trouve un certain nombre de déclarations d’élus, et notamment de mon compétiteur à Bordeaux, un peu rapides. On n’obtiendra jamais rien en partant avec un tel état d’esprit".
Le montant d'un voyage à l'unité à Bordeaux est parmi les moins élevé dans les grandes villes de France. Le ticket coûte 1,40 euros (comme à Lille par exemple), contre 1,50 euros à Nantes, Grenoble et Marseille, ou 1,70 euros à Lyon.
Bordeaux : ce que coûte vraiment le tramway
La CUB débourse chaque année un peu plus de 100 millions d’euros pour l’exploitation du réseau de transports. Les bus coûtent bien plus cher que le tram.
Pour répondre à ces questions, partons du prix d’un tickarte. 1,40 € pour voyager à volonté, une heure après la validation. C’est l’un des tarifs les moins élevés en France : le ticket à l’unité coûte 1,50 € à Grenoble, Nantes et Marseille, 1,70 € à Lyon… 1,40 €, donc, à Bordeaux. Ce montant ne couvre en fait que le tiers des dépenses liées à l’exploitation du réseau. 34 % en 2012. Le reste du coût réel d’un voyage, soit les deux tiers, est financé par la collectivité, autrement dit par tous les contribuables.
C’est que l’exploitation quotidienne, sept jours sur sept, de cette énorme machine, génère des frais massifs : le personnel (2 200 salariés environ), l’entretien du matériel et des lignes, les dépenses d’énergie… Au final, 160 millions d’euros de dépenses par an pour Keolis. Contre 55 millions de recettes provenant des usagers (abonnements, tickartes…). La Communauté urbaine compense le manque à gagner et a ainsi versé à Keolis, l’an dernier, 107 millions d’euros. Soit un douzième de son budget annuel (1,2 milliard d’euros).
Faut-il en déduire que le tram coûte 100 millions d’euros chaque année à la CUB ? Non, c’est plus compliqué que ça, car le tramway n’est pas, parmi les transports bordelais, le plus coûteux. 70 % du coût d’un voyage en tram est remboursé par le tickarte. Logique : la fréquentation carbure, les recettes aussi. "Le tram coûte cher à la construction. 800 millions par exemple pour la troisième phase. En revanche, en fonctionnement, les résultats sont bons", confirme Christophe Duprat, vice-président de la CUB en charge des transports.
D’où vient, alors, ce déficit de 100 millions ? Surtout des bus. En particulier de lignes peu utilisées, mais considérées comme nécessaires au maintien d’une certaine équité entre les 28 communes de l’agglomération. "Les trois lignes de tramway ne desservent que 40 % de la population de la CUB, rappelle Christophe Duprat. Les bus permettent au réseau de transport de jouer un vrai rôle de service public."
Ce choix, l’équilibre entre territoires, fait consensus parmi les élus de la CUB. En revanche, il est contesté par certains représentants associatifs, comme Denis Teisseire, président de l’association Trans’Cub. "Le réseau tel qu’il est dessiné occasionne des coûts disproportionnés. Certaines lignes de bus sont excessivement déficitaires. Et la rentabilité du tramway est plus contrastée qu’il n’y paraît : il y a la partie centrale qui marche bien et est souvent saturée ; en revanche, les extensions, les queues de ligne restent peu fréquentées. Il faudrait, dans tous ces secteurs moins denses en habitants, envisager des modes de desserte moins onéreux que le tram ou le bus..."
Et de poursuivre : "On paie le prix d’un tracé très politique, qui vise à satisfaire les maires et qui néglige des axes majeurs comme les cours et les boulevards bordelais, où la possibilité d’une desserte tram doit être étudiée. Par ailleurs, il y a un vrai souci avec la fraude. Le taux de fraude qui est annoncé paraît inférieur à la réalité."
Selon ce taux, déterminé chaque année au terme d’un questionnaire auprès de 5 000 voyageurs, un dixième des usagers (10,5 %) fraudait en 2012. Ce taux s’élevait à 15 % en 2009. Il recule, mais demeure important. Le manque à gagner est évalué à 3 millions d’euros par an pour Keolis.
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