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"Gestion de l’eau : des collectivités se rebiffent" dans METRO par Olivier LUCAZEAU (AFP)

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Factures exorbitantes ou délibérément floues, tarifs incompréhensibles : plusieurs maires ou présidents de collectivités se rebiffent face à Veolia, Suez ou la Saur, les trois géants qui se partagent le marché de l’eau en France.

"On se pose même la question de revenir en régie municipale, pour leur faire peur", souligne Daniel Le Moal, adjoint aux Finances de Saint Nolff, une commune de 4.088 habitants du Morbihan dont le réseau d’eau est pourtant géré depuis 20 ans par la Saur, filiale jusqu’en 2005 du groupe Bouygues.

Pour cet élu, "monté" à Paris cette semaine pour le 89e congrès des maires, "les gros groupes profitent un peu trop de leur monopole (...) et il n’y a pas de concurrence réelle entre eux". "La Bretagne, par exemple, ils se la sont partagée en secteurs", accuse-t-il.

Petit maire rural ou élus de grandes villes, tous supportent mal cette dépendance vis-à-vis des entreprises qui gèrent leur réseau d’eau. Y compris certains présidents de très grandes agglomérations.

En révélant, le 17 novembre, le protocole d’accord arraché à la Lyonnaise des eaux, Alain Rousset, président de la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB), n’a pas caché que les négociations avaient été "rudes". A la base, c’est pourtant 80 millions d’euros de "surprofits" qui ont été réalisés par la filiale du groupe Suez entre 1992 et 2005 avant d’être repérés par les services de la CUB.

Flou des comptes aidant, ces "surprofits" ne sont pas rares du côté des mastodontes qui gèrent l’eau en France.

Mardi, c’est la Communauté urbaine de Lyon qui a ainsi mis en évidence 94 millions d’euros collectés par la Générale des Eaux (groupe Veolia) auprès des usagers pour des travaux jamais effectués. Et le même jour, c’est la Société des Eaux du Nord (SEN), une filiale à 50-50 de Veolia et Suez, qui a été accusée par des associations d’avoir indûment perçu 164 M EUR entre 1986 et 1996 pour la distribution de l’eau dans l’agglomération lilloise.

Parlant de "faux procès", le PDG de la SEN a seulement concédé "un retard d’investissement de l’ordre de 156 M EUR" constaté fin 1996.

"C’est vrai que les consommateurs se sentent parfois piégés", explique Fernand Fauqueux, maire de Courbépine, commune de l’Eure de 650 habitants dont le réseau d’eau est géré par Veolia depuis trois ans. "Mais soyons francs, les communes sont incapables de gérer le problème de l’eau toutes seules", reconnaît-il.

"C’est beaucoup plus facile pour nous, mais c’est vrai que ça nous coûte", concède également Robert Denost, maire de Saint-Vincent-Jalmoutiers, en Dordogne : "Et les gens grognent, ils trouvent que c’est trop cher".

"Il y a même des élus qui veulent repasser en régie municipale", explique Yolande Vignal, maire du Garn, un bourg gardois de 221 habitants dont l’alimentation en eau dépend de la SAUR, comme 24 autres petits villages voisins avec qui il est allié au sein d’un syndicat de communes.

Mais revenir en arrière est difficile, reconnaît Daniel Le Moal : "Cela oblige à un lourd investissement en matériel, à embaucher des personnes supplémentaires, on est un peu démuni".

Alain Lyps, adjoint au maire de Wizernes, une commune de 3.500 habitants du Pas-de-Calais dont le réseau d’eau est toujours en régie municipale, ne regrette pas de ne pas avoir cédé aux sirènes des grands groupes : "Nous n’avons aucune tentation de les rejoindre, tant que nous pourrons tourner comme ça, nous tournerons comme ça".

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