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Avec la Vente de 36 Rafale à l’Inde : la prolifération nucléaire progresse !
C’est un concert de louanges politiques depuis que les ministres de la défense indien et français : Manohar Parrikar et Jean-Yves Le Drian, ont apposé, vendredi 23 septembre, à New Delhi, leurs paraphes sur le contrat avalisant l’achat par l’Inde de 36 avions de chasse Rafale construits par Dassault Aviation.
Les consensus politiques sont rares, mais en matière de ventes d’armes, il y a peu de différences entre la gauche et la droite, en effet, quasiment aucun politique n’a eu un regard critique ou posé ne serait-ce que quelques questions. Le made in France, « le cocoricoïsme », le gonflage de biceps pour ce genre de vitrine technologique sont plus forts que les clivages politiques.
Pour autant, ce ne sont pas les questions qui manquent et on ferait bien de s’interroger sur les conséquences à moyen et long termes que pourrait avoir ce contrat.
Au niveau local, tout le monde se félicite de cette opération au nom de l’emploi. Sujet on ne peut plus consensuel, quand il y a de l’emploi, fermé le ban, l’utilité sociale des emplois passe au second plan! Les autres problèmes qui peuvent survenir (environnementaux, éthiques, moraux ou géopolitiques) passent à la trappe. Mais, compte tenu du contexte industriel de l’entreprise DASSAULT, les Rafale indiens ne créeront pas une embellie extraordinaire pour l’emploi, au mieux ce contrat consolidera l’emploi local en Aquitaine dans ce secteur.
La transparence est bien sûr aussi loin d’être la première vertu de ce type de contrat.
Le chiffre annoncé de 8 milliards d’euros se décompose ainsi, 3.42 milliards pour les avions, 700 millions en armement, 1.7 milliard d’équipement israélien et1.8 milliards pour la maintenance). Aussi le volet appelé « offsets » , transferts de technologies (article du monde sur le sujet) et contreparties industrielles –, représente 50 % du marché et diminue fortement la valeur nette pour la France. (voir l’article de Times of India)
Ainsi le Rafale sera vendu aux environs de 110 millions d’euros l’unité soit la moitié de son prix initial. Quel gain réel pour l’entreprise et pour la balance commerciale du pays ? En tout état de cause, ce contrat ne fait que renforcer la part du contribuable qui a déjà payé le développement et la recherche des rafales, pour 43.56 milliards d’Euros (rapport du Sénat de 2012).
L’autre enjeu rarement évoqué est la prolifération nucléaire.
Outre le fait que le gouvernement indien va dépenser l’équivalent d’un an et demi de son budget consacré à la santé dans un pays où des dizaines de millions de patients tombent sous le seuil de pauvreté et doivent s’endetter pour se soigner, le Rafale n’est pas simplement un super avion de chasse bourré de super technologie.
Le Rafale et c’est pour ça que les Indiens l’ont choisi, peut emporter un missile de croisière nucléaire qui porte le nom de Air Sol Moyenne Portée Amélioré (ASMP-A) et qui est équipé d'une ogive nucléaire (qui se nomme Tête Nucléaire Aéroportée) d'une puissance de 300 kilotonnes. En cas de mission nucléaire, ce n'est pas un seul Rafale qui partirait équipé de ce missile, mais plusieurs (à minima 3). L’Inde est justement en train de s’équiper d’un missile de croisière à capacité nucléaire (BrahMos) et celui-ci sera certainement adapté au Rafale.
Ainsi par cette opération on renforce la prolifération nucléaire de l’Inde et le potentiel de belligérance avec le Pakistan (voir l’article du Monde du 01 Octobre) ou du Figaro et la Chine. Et si l’Inde est une grande démocratie, qui sait quelles seront les conséquences de ce contrat dans 10, 20 ou 30 ans. En 2015, certaines ventes d’armes de la France concernaient des belligérants s’opposant ouvertement. La France a ainsi vendu pour 412 millions d’euros d’armes à l’Inde et pour 83,3 millions d’euros d’armes au Pakistan, deux pays qui se disputent le Cachemire depuis leur indépendance, en 1947.
En vendant des Rafale la France arme des pays « ennemis » et alimente la prolifération nucléaire alors que dans les discours, les politiques disent lutter contre cette même prolifération. On critique les Etats qui augmentent leurs arsenaux militaires mais la France les alimente voire les promeut. Nous sommes en pleine contradiction entre les discours et les actes. Sur sa vente d’avion similaire, le Gripen, la Suède à une clause interdisant le port de missile nucléaire.
Après les contrats avec l’Egypte, le Qatar et maintenant l’Inde, la France continue de jouer aux apprentis sorciers. L’argument qui consiste à dire « si ce n’est pas nous ce sera d’autres », ne tient pas. Par son histoire et sa position à l’ONU, la France a le devoir d’être exemplaire! En matière de pollution, nous ne sommes pas le premier pollueur, pour autant, avec les réserves qu’on peut y apporter, notre engagement dans la COP 21, participe aujourd’hui à la signature des premiers pollueurs comme la Chine ou les Etats-Unis. En matière d’armement et de prolifération nucléaire, il en va de même, nous ne sommes pas le premiers, mais notre devoir serait de prendre les devants. Pour la première fois, ce 28 septembre une résolution a été déposée à l'ONU pour demander la création d'un Traité d'interdiction des armes nucléaires en 2017, on comprend mieux pourquoi la France votera non à cette résolution, car cela lui ferait un argument de vente en moins !
Gérard CHAUSSET
Adjoint au Maire de Mérignac
Président du groupe EELV de Bordeaux-Métropole
Contact : 06 62 48 74 92
Mail : chausset@gmail.com
www.gerardchausset.fr
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