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Débat en conseil municipal sur le projet Métropolitain, intervention et revue de presse

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Conseil Municipal de Mérignac du 3 octobre 2011

Le Million est-il raisonnable ?

S’interroger sur la ville de demain est une démarche nécessaire à l’heure où notre société est en constante mutation, où les projets urbains se multiplient et où les conséquences de la crise économique, sociale et écologique sont de plus en plus dures pour les habitants.

C’est aussi une démarche qu’entreprend assez logiquement finalement la Communauté Urbaine au regard de son rôle de stratège de l’agglomération. En effet, la CUB n’accompagne plus seulement le développement des villes, elle participe à le dessiner et en est un des principaux moteurs. Ainsi, avec l’opération 50 000 logements elle accompagne la stratégie de développement urbain. Avec le SDODM elle projette et définit les axes de développement du réseau à l’horizon 2025-2030. Avec le Plan Climat elle met l’agglomération en ordre de marche pour lutter contre le changement climatique. Il en va de même avec le schéma de développement économique.

Les élus Verts - Europe Ecologie ont donc participé avec beaucoup d’intérêt à la démarche "Bordeaux Métropole 3.0" et ce d’autant plus qu’elle correspond à notre vision transversale et de long terme. Ainsi à travers ce projet le premier enjeu est de consolider le rôle stratégique et moteur de vie de la CUB. Implicitement, la CUB est de moins en moins un EPCI et de plus en plus une métropole, c’est le sens de l’histoire.

Un million pour faire quoi ?

Le terme emblématique de ce projet est assurément celui de l’agglomération "millionnaire". Si évoquer l’agglomération millionnaire a certes le mérite de poser le débat sur la ville à laquelle on aspire, nous devons cependant être particulièrement vigilants dans le maniement de ce concept car il peut s’avérer anxiogène si l’on n’y associe aucune pédagogie.

Car si on n’y prend pas garde, le concept d’agglomération millionnaire, associé à celui de densité, pourrait faire appel dans l’imaginaire collectif aux images mentales de mégalopole avec tout ce que cela implique : voies de communication saturées, horizon gris et bétonné à perte de vue, perte de lien social… Or, c’est précisément ce que veut éviter ce projet métropolitain. Ce dernier porte en effet comme ambition d’imaginer un modèle qui puisse ramener les jeunes familles dans l’agglomération et accueillir de nouveaux habitants à l’horizon 2030 tout en préservant la qualité de vie.

Sur 3 habitants nouveaux en Gironde aujourd’hui 2 vont s’installer hors CUB et cela sans compter l’exode urbain des jeunes ménages. A terme, la CUB pourrait être une ville vouée à la « gentryfication » réservée aux étudiants, aux cadres, aux retraités et aux personnes les plus précarisées. Ce phénomène d’exclusion des familles actives modestes contribue fortement à l’étalement urbain car si elle n’habitent pas la CUB elles y travaillent le plus souvent.

Il convient donc de trouver un remède et d’inverser la tendance : faire en sorte que ces 2 nouveaux habitants sur les 3 qui s’installent dans notre région viennent sur la CUB. C’est le sens du projet proposé. C’est souhaitable et c’est possible : il y a de l’espace constructible.

Mais au mieux, en 2030/2035 nous ne serons pas 1 million comme le titre le document de communication de la CUB mais 900 mille, soit déjà cent mille de plus que la projection tendancielle de l’INSEE qui ne prend pas en compte bien sûr le volontarisme du projet métropolitain de la CUB.

Il faut donc apporter un peu de mesure à ce concept d’agglomération millionnaire et le revisiter au regard de la réalité des projections, de nos capacités à faire et du degré d’acceptation de la population.

D’autre part, n’oublions pas l’équilibre plus large de notre territoire. Il est absolument nécessaire de travailler en coopération avec les communautés voisines afin que le volontarisme de la CUB ne vienne pas le déséquilibrer et couper court à la volonté légitime de développement de ces communes. L’objectif n’est pas de désertifier l’arrière-pays (hinterland) de la CUB.

Par ailleurs, l’accueil de 200 000 nouveaux habitants sur la CUB suppose un changement radical de paradigme en terme de mobilité car nos voiries ne sauraient absorber 100 000 nouvelles voitures sans risquer l’asphyxie complète. Et je tiens à le préciser d’emblée ici, il n’y aura jamais assez de places de stationnement pour tout le monde. Est-ce à dire qu’il faut ne rien faire ? Non justement, car aujourd’hui l’exode urbain des familles actives contribue largement à l’étalement urbain et à la thrombose que l’on connait sur certains axes. Il convient donc d’accueillir en priorité des habitants auprès des axes forts de TCSP et de réduire progressivement l’usage de la voiture.
Pour accueillir ces nouveaux habitants, un certain nombre de préalables sont également nécessaires pour être en capacité de produire quantitativement le nombre de logements projetés, en premier lieu se doter d’un véritable outil foncier…que la droite bordelaise refuse ! Nous devrons également porter une attention particulière à la définition de réponses qualitatives adéquates au besoin d’accueil en termes de coût, de typologie des logements, de cadre de vie et de qualité environnementale.

Pour Mérignac, je situe l’horizon non pas à 90 mille habitants ou 100 mille, mais autour de 80 mille habitants, ce qui constitue un horizon durable et acceptable d’ici 20 ans. Nous avons l’espace, il ne s’agit pas de bétonner mais de composer une ville durable. Depuis 30 ans nous prenons 5 mille habitants tous les dix ans ainsi nous sommes passés de 51 000 h en 1982, à 57 en 1990, 62 en 1999, 67 en 2009. Si on garde ce rythme dans 20 ans nous serons à peine à 80 mille habitants. Il nous faut donc un peu accélérer le rythme de façon mesurée, pour gagner 13 mille habitant en 20 ans.

Pour en revenir plus précisément au contenu du projet métropolitain, c’est en tenant compte de ces précisions, que nous partageons globalement ses orientations, en particulier les axes portant sur la solidarité et la sobriété.
A ces axes, nous souhaiterions y ajouter 3 volets, indispensables à nos yeux :
1) Une métropole audacieuse et engagée, qui ose rompre avec la "tradition" séculaire de l’étalement urbain
2) Une métropole transportée qui s’appuie sur les moyens de mobilité forts pour constituer l’armature de la ville au quotidien
3) Une métropole rénovée et transformée qui densifie ses centres de quartier, qui fait de l’accueil des familles une priorité et développe son réseau de mobilité douce (piétons, vélo) pour réduire la dépendance automobile

Pour conclure, pour que le projet métropolitain ait une véritable déclinaison concrète, l’action quotidienne de la CUB et la démarche prospective ne doivent pas se dérouler en parallèle, sans se croiser. Si les mots sont importants, les actes ne doivent pas être contradictoires : foncer tête baissée dans des projets relevant d’une logique déjà dépassée, à l’image du projet de grand stade ou du grand contournement autoroutier de Bordeaux, c’est en effet déjà s’inscrire à contre-courant des scénarii projetés pour les 20-30 ans à venir.

Gérard Chausset

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