Primaire écologiste : Joly crée la surprise

Eva Joly, avec 49,75 % des suffrages exprimés à la primaire d'Europe Écologie-Les Verts (EE-LV), a créé la surprise en devançant nettement Nicolas Hulot, qui n'était crédité que de 40,22 %. À 63 voix près, elle a ainsi raté une désignation dès le premier tour, et devra donc en affronter un second.

Pour Jean-Vincent Placé, secrétaire général du mouvement, « il a fait un meilleur score que je ne le pensais, parce qu'en cours de campagne il a rejoint nos positions sur le nucléaire et sur la gouvernance ».

Pour Noël Mamère, « les électeurs écologistes ont pris beaucoup de maturité politique, et ce n'est pas le raz-de-marée qu'on annonçait ». Mais, ajoute-t-il, prudent, « rien n'est joué pour le second tour. En 2002, j'avais obtenu 43 % au premier tour et Lipietz qui n'avait obtenu que 26 % a gagné au second en me battant de 49 voix ».

Jean-Vincent Placé en convient : « Tout est encore possible. Sur les 33 000 inscrits, 8 000 n'ont pas voté au premier tour. Nicolas peut encore les mobiliser. Je connais des gens qui en tenaient pour Hulot et qui ont voté pour Joly pour qu'elle ne soit pas décrochée. »

Quoi qu'il arrive, le grand changement opéré par Nicolas Hulot ces dernières semaines a largement contribué à améliorer son image auprès des écologistes orthodoxes puisqu'il a adopté les deux primats défendus par Noël Mamère : la sortie progressive du nucléaire et l'abandon du scrutin majoritaire pour introduire une part de représentation proportionnelle. Selon lui, c'est la base non négociable sur laquelle EE-LV attend le PS pour négocier l'accord programmatique en vue des législatives qui suivront la présidentielle.

Selon Daniel Boy, chercheur au Cevipof (centre de recherches politiques de Sciences Po), c'est en effet la seule chose qui intéresse les écologistes : « Même s'ils ne font pas un score extraordinaire à la présidentielle, même si Eva Joly n'est pas le chemin le plus facile, pour eux le plus important c'est que la doctrine soit sauvegardée. »

Finalement, contre toute attente, la base historique et militante des Verts a été rejointe par les « coopérateurs » d'EE-LV. « On avait l'impression qu'en élargissant le cercle au-delà des 12 000 militants encartés on ferait pencher la balance du côté d'une plus grande ouverture médiatique. Et ce n'est pas ce qui s'est produit. C'était pourtant l'analyse de José Bové », conclut Daniel Boy.

Pour les proches de Nicolas Hulot, on semblait y croire encore hier et on se préparait déjà au débat qui doit opposer ce soir à Grenoble les deux gagnants du premier tour. Il n'était pas question d'abandonner la partie comme le suggérait Gérard Chausset, conseiller communautaire de Bordeaux : « Cela éviterait des affrontements inutiles, il ferait mieux de prendre acte de sa défaite et d'appeler dès demain les électeurs à voter pour Eva Joly ! »

Les partisans de Nicolas Hulot ont réalisé qu'il lui avait sans doute manqué quelques semaines de campagne alors qu'Eva Joly avait commencé dès l'automne 2010 et s'était mise au clair avec les positions d'EE-LV clairement identifiées à gauche. Noël Mamère, qui avait dirigé sa campagne, avait pris soin de lui éviter tout faux pas en ce sens.

Nicolas Hulot, parti plus tard, avait au contraire commencé de façon pas toujours très claire vis-à-vis de l'énergie nucléaire, alors que la catastrophe de Fukushima avait déjà marqué les esprits.

Cécile Duflot, la secrétaire générale d'EE-LV, qui avait pris le risque d'organiser cette primaire, s'est félicitée du grand succès qu'elle avait rencontré par le nombre d'inscrits (22 896) et le « formidable taux de participation » de 77,3 %. Elle a ajouté que « les résultats ont été validés par les mandataires des candidats présents au moment du dépouillement final ».

Les « petits candidats » comme l'Alsacien Henri Stoll (5,2 %) et le Girondin Stéphane Lhomme (4,44 %) n'ont donc pas troublé le débat entre l'ancien animateur d'émissions télévisées sur TF1 et l'ancienne juge d'instruction.